Classification
Typologies de bâtiments classés monuments historiques et travaux
« En raison de leur valeur patrimoniale, artistique ou historique, certains immeubles sont protégés par un classement (arrêté ministériel ou décret du Conseil d’État) ou par une inscription (arrêté du préfet de région ou du ministre chargé de la culture) au titre des monuments historiques », rappelle le site internet de l’administration française www.service-public.fr. Les conditions pour obtenir les autorisations de travaux sur ces ouvrages sont fonction de cette classification. Les bâtiments avec peu ou sans valeur patrimoniale particulière peuvent également être concernés, comme le mentionne l’article L.621-31 du code du patrimoine : « Lorsqu’un immeuble est adossé à un immeuble classé ou situé dans le champ de visibilité* d’un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques, il ne peut faire l’objet, tant de la part des propriétaires privés que des collectivités et établissements publics, d’une construction nouvelle, d’aucune démolition, d’aucun déboisement, d’aucune transformation ou modification de nature à en affecter l’aspect, sans une autorisation préalable ».
* Est considérée comme étant dans le champ de visibilité d’un monument classé, toute autre construction visible du monument ou visible en même temps que lui et située dans un périmètre n’excédant pas 500 m.
Procédure
L’autorisation d’urbanisme
Avant d’engager des travaux de rénovation sur un bâtiment situé dans le champ de visibilité d’un édifice classé ou inscrit, le maître d’ouvrage doit effectuer une demande d’autorisation d’urbanisme auprès des autorités compétentes. Chaque demande est spécifique à la nature des travaux souhaités. Par exemple, pour une rénovation des façades modifiant l’aspect extérieur de l’ouvrage, il est nécessaire de faire une demande préalable auprès de la mairie, au titre du code de l’urbanisme. Néanmoins, « la décision accordant le permis ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable doit intervenir après l’accord de l’Architecte des bâtiments de France (ABF) », précise l’administration. Si ce dernier rend une décision dite « conforme », elle a valeur d’obligation pour l’autorité municipale. Si l’avis est « simple », alors la mairie n’y est pas liée et peut passer outre. « Elle engage alors sa propre responsabilité, souligne Qualibat. L’avis fait référence en cas de contentieux. »
Une fois délivrée (dans un délai de deux mois), l’autorisation d’urbanisme doit être affichée de manière visible de l’extérieur pendant la durée du chantier. Quant aux travaux, ils doivent faire l’objet d’une déclaration réglementaire d’ouverture de chantier à adresser à la mairie avant le début des opérations.
Encadrement
Compatibilité avec la rénovation énergétique
La promulgation, le 12 juillet 2010, de la loi n°2010-788 portant engagement national pour l’environnement (loi Grenelle 2) a conduit à l’insertion de l’article L.111-16 au code de l’urbanisme. Ce dernier précise que « nonobstant toute disposition d’urbanisme contraire, le permis de construire ou d’aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable ne peut s’opposer à l’utilisation de matériaux renouvelables ou de matériaux ou procédés de construction permettant d’éviter l’émission de gaz à effet de serre, à l’installation de dispositifs favorisant la retenue des eaux pluviales ou la production d’énergie renouvelable correspondant aux besoins de la consommation domestique des occupants de l’immeuble ou de la partie d’immeuble concernée ». Or, parmi ces « dispositions d’urbanisme contraires » figurent clairement, dans la suite de l’article, les immeubles et sites classés ou inscrits, les secteurs sauvegardés, les zones de protection du patrimoine architectural (article L. 642-1 du code du patrimoine), le périmètre de protection d’un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques (article L. 621-30 du code du patrimoine) et les parcs nationaux. Par conséquent, les travaux de rénovation énergétique ne peuvent être refusés sauf dans les cas précités.
Analyse
L’étude ENRABF et l’ITE
Est-il alors possible de rénover énergétiquement des bâtiments anciens proches d’ouvrages classés ou inscrits ? En 2007, le ministère de l’environnement a confié à l’association Maison paysanne de France et le bureau d’études Tribu énergie, la réalisation d’une étude visant à déterminer les actions pouvant être menées pour répondre à cet enjeu. Ce projet, baptisé ENRABF, a suivi quatre objectifs :
- la compréhension des raisons conduisant les ABF à formuler des avis parfois négatifs au regard des travaux relatifs aux économies d’énergie ;
- la proposition de solutions permettant de concilier les actions réalisées tout en préservant le caractère patrimonial ;
- la sensibilisation du grand public à ces problématiques de rénovation et la conduite d’un dialogue constructif avec les ABF ;
- la mise à disposition de fiches techniques à remplir pour être jointes à la demande de travaux et faciliter ainsi son instruction par les ABF.
L’isolation thermique par l’extérieur associée à un bardage rapporté est particulièrement concernée par ces problématiques car ce procédé modifie profondément l’aspect extérieur de l’ouvrage. Sans surprise, ENRABF l’a proscrit pour les monuments historiques ainsi que pour les bâtiments à valeur patrimoniale importante, notamment s’ils sont classés. Éventuellement, un enduit sur isolant (mortiers isolant chaux/chanvre) pourra être prescrit. Les cas des ouvrages situés à moins de 500 m d’un monument historique, d’une zone sauvegardée ou en zones de protection du patrimoine architectural sont plus ouverts. Ainsi, toujours selon ENRABF, lorsque le bâtiment possède une valeur patrimoniale « classique », « l’enduit existant sera remplacé par un sous-enduit isolant recouvert d’un enduit traditionnel à la chaux. Les pignons pourront également être isolés par l’extérieur sous réserve d’une cohérence architecturale des liaisons ». Lorsque l’ouvrage ne présente aucune valeur patrimoniale, l’association d’une ITE avec bardage devient possible si l’ensemble présente, là aussi, « une cohérence architecturale des liaisons et des couleurs ».
Mais les dispositions esthétiques et la préservation de l’aspect extérieur du bâtiment ne sont pas les seules à prendre en compte. En effet, il faut également veiller à « conserver les propriétés hygroscopiques des matériaux, notamment lors de la mise en place d’isolant et à ne pas engendrer des pathologies par exemple liées à l’humidité ». Une inspection préalable des murs et d’éventuels désordres comme des remontées capillaires doit donc être systématiquement réalisée.
Terrain
Dans les faits
Pour faciliter l’examen du dossier par les ABF, ENRABF propose des téléchargements de fiches à joindre au dossier en fonction des dispositions constructives souhaitées. L’une d’elle concerne les façades (www.enrabf.fr). Y seront notamment mentionnés la place et la nature de l’isolant, le type de revêtement, les continuités avec les soubassements, les appuis de fenêtre et la toiture. Car finalement, « les ABF refusent moins de 10 % des demandes, souvent pour des raisons de dossier incomplet, rappelle Nathalie Tchang, directrice du bureau d’études Tribu Énergie. De plus, ils formulent souvent seuls leur avis et leur décision peut être subjective. Tout dépend de l’enjeu que représente l’ouvrage à rénover. S’il n’a pas de valeur patrimoniale propre, une rupture complète d’architecture peut être acceptée si l’environnement le permet. Par conséquent, il est conseillé de prendre rendez-vous avec les ABF en amont d’un projet afin d’évaluer quelles sont les pistes de rénovation possibles. »