Un bardage rapporté ventilé en polycarbonate peut être mis en œuvre sur l’intégralité de la façade. Les surfaces installées sont donc souvent plus importantes qu’en paroi translucide. © Poly-Pac
Un bardage rapporté ventilé en polycarbonate peut être mis en œuvre sur l’intégralité de la façade. Les surfaces installées sont donc souvent plus importantes qu’en paroi translucide.
Forts de leur expérience en matière de paroi translucide, les fabricants ont adapté leurs produits aux contraintes du bardage rapporté ventilé. Le secteur est porteur mais le manque de recul quant à la durabilité des systèmes impose rigueur et prudence.

 
 
 

Sur le marché du polycarbonate alvéolaire (PCA) en façade, les solutions de bardage rapporté ventilé pèsent peu par rapport à la façade légère translucide née il y a plus de vingt ans. Mais la tendance est résolument à la hausse. Les fabricants ont commercialisé les premiers pro-cédés de bardage rapporté ventilé il y a cinq ou six ans. « Les chantiers étaient alors anecdotiques. Aujourd’hui, les demandes sont plus régulières », explique Cyril Gambin, directeur technique chez Everlite. La conjonction de deux facteurs explique-rait cet intérêt croissant pour ces complexes. Tout d’abord, un esthétisme différent de ce que pro-posent les produits plus classiques. Jeux de reflets, de transparence, vaste gamme de teintes… Autant d’effets qui marquent l’ouvrage et qui permettent aux architectes d’animer différemment leurs façades. Ensuite, le développement de l’isolation thermique par l’extérieur, technique qui privilégie les solutions de bardage rapporté. Les fabricants de polycarbo-nate se doivent de suivre le mouvement sous peine de passer à côté de ce vaste marché. Ce dernier se démarque des solutions translucides, notamment en termes de mètres carrés mis en œuvre. « Les façades légères en PCA sont destinées à l’éclairement de l’intérieur des bâtiments. Il est rare qu’elles dépassent 20 % de la surface totale installée, précise Pierre Michalowski, directeur commercial chez Poly-Pac, agence technique pour la France de l’usine italienne Gallina. En bardage rapporté avec ITE, les panneaux de polycarbonate peuvent constituer l’intégralité du parement. Les commandes de 5 000 ou 6 000 m² sont exceptionnelles en paroi translucide. Elles le sont beaucoup moins en bardage rapporté ventilé. »

 


Elévation de la température

 

Les perspectives de développement sont donc plutôt optimistes et devraient être portées par la pro-chaine validation des Avis techniques des procédés, actuellement en cours d’études par la commission du GS2*. En attendant, les bardeurs se réfèrent aux différents documents techniques mis à leur disposition par les fabricants (cahier des prescrip-tions techniques, recommandations…). En effet, si la légèreté du matériau et sa facilité de pose font partie des atouts indéniables du produit, certains impératifs de mise en œuvre doivent être respectés. « Dans le contexte des parois translucides, les propriétés et le comportement du polycarbonate sont connus, rappelle Dominique Royer, directeur technique de l’entreprise Smac et président du GS2. En revanche, positionnez-le devant un isolant et les sollicitations thermiques changent. »

 
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© Bruno Ramain
Le bardage rapporté ventilé en polycarbonate alvéolaire est adapté à tous les types de bâtiment. Ici, un immeuble de logements étudiants à Grenoble.
 

Par conséquent, l’expérience acquise grâce à la façade légère translucide ne peut pas être généralisée au bardage rapporté. L’exposition au rayonnement solaire provoque une élévation significative de la température du panneau. La chaleur accumulée est bloquée par l’isolant. Cet effet de surchauffe pourrait être à l’origine de désordres, « tels que la perte d’une partie de ses per-formances mécaniques. Le PCA est un matériau de synthèse qui devient particulièrement sensible aux températures supérieures à 120 °C », signale Dominique Royer. 
La solution proposée par les fabricants est d’intégrer une lame d’air de l’ordre de 50 mm d’épaisseur entre l’isolant et le panneau, ventilée en parties haute et basse. L’air chaud est ainsi évacué plus rapidement et la température ne dépasse normalement pas la valeur de 90 °C prise en compte comme seuil maximal dans les études du CSTB relatives à la procédure d’évaluation. L’effet de surchauffe est évité et la dilatation excessive du matériau est prévenue.

 

Dilatation

 

Pour autant, ce type de disposition n’évite pas les effets de dilatation. Les documents techniques des produits indiquent des contraintes de dilatation entre 3,5 mm/ml et 4 mm/ml pour des deltas de tempéra-ture de 50 °C à 60 °C. Les dispositions constructives des produits les prennent en compte. Dans leur grande majorité, les panneaux de polycarbonate sont munis, dans leur largeur, de relevés crantés clipsés dans l’ossature aluminium via des connecteurs (voir encadré et article p. 47). Ils sont donc immobilisés. Selon les fabricants, ce mode de mise en œuvre n’engendrerait pas de dommage car les largeurs de plaques proposées (entre 600 et 1040 mm selon les fabricants) ne sont pas assez importantes pour créer des jeux de dilatation significatifs.  
Dans sa hauteur, en revanche, le mouvement des plaques est beaucoup plus conséquent. D’autant plus qu’il n’y a, en théorie, aucune limite de taille à la fabrication. « Seules les contraintes de transport imposent une longueur maximale d’environ 16 m », ajoute Pascal Montagne, responsable du pôle bâti-ment du distributeur Sunclear. Les effets de dilation peuvent donc faire jouer le matériau sur plusieurs centimètres. La réponse la plus courante à cette problématique s’inspire du bardage translucide. Il s’agit de contraindre le panneau à bouger en partie haute à l’aide de points fixes implantés au pied de chaque profil vertical. Au sommet, le positionnement de la bavette d’acrotère est calculé en fonction de l’espace nécessaire pour le mouvement des plaques. Cette ouverture permet également de faire circuler l’air dans la lame d’air.

 

Connectable ou emboîtable ?

 

Aujourd’hui, la plupart des solutions du marché propose des parements en polycarbonate qui se clipsent sur une ossature en aluminium à l’aide de connecteurs. C’est le cas des produits Gallina et Everlite. Un autre procédé existe, fabriqué notamment par l’industriel Sabic Innovative Plastics : l’emboîtement des plaques les unes dans les autres, sans recours à des profils intermédiaires. Il reste encore minoritaire sur le marché du bardage rapporté. 

 

Autre contrainte à considérer : si l’argument esthé-tique est l’un des atouts majeurs de l’usage du poly-carbonate en bardage rapporté, la transparence du matériau s’avère peu séduisante en cas de teintes claires (cristal surtout). L’ensemble du système de bardage reste visible à l’observateur. Pour camoufler ossature, isolant et fixation, les fabricants proposent la mise en œuvre de pan-neaux bicolores. Sur une même plaque, la face extérieure garde la teinte de type cristal. Une autre couleur moins transparente est choisie pour l’intérieur qui peut également être co-extrudée pour devenir opaque.

 
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© David Boureau / Dietmar Feichtinger Architectes
Les effets miroirs et de transparence propres au polycarbonate alvéolaire donnent aux logements sociaux de la ZAC Claude Bernard (Paris 19e) une personnalité particulière.
 

Malgré tout, le PCA s’adapte plutôt bien aux exi-gences du bardage rapporté ventilé. Sa mise en œuvre sans joint ouvert rend les façades étanches à l’eau, ce qui protège l’isolant. Disponible en grande longueur, il permet d’obtenir des façades continues avec un nombre de manipulations limitées. Et grâce à l’expérience de la paroi translucide, certains com-portements et adaptations de mise en œuvre ont été anticipés. Cependant, « les références françaises en la matière sont encore trop peu nombreuses et trop récentes pour qu’on puisse affirmer avec certitude une durabilité prévisionnelle des plaques dans ces systèmes équivalente à celles utilisées de longue date en façade translucide », rappelle Dominique Royer.

 

Traitement des panneaux : l’expérience de la façade translucide 

 

A l’instar des façades légères, « les grands ennemis du polycarbonate en bardage rapporté, ce sont les rayons UV », affirme Pierre Michalowski. Affaiblissement des propriétés mécaniques, perte de transmission lumineuse… : leur action peut être particulièrement néfaste. Chaque panneau est donc traité à l’aide  d’un agent protecteur co-extrudé dans la masse sur une face (extérieure) ou sur les deux, selon les fabricants.  
Il est également possible d’ajouter un vernis supplémentaire protégeant des rayures et facilitant le nettoyage. Avec toutefois comme conséquence de perdre la brillance du matériau. 

 

« L’expérience acquise grâce à la façade légère translucide ne peut pas rapporté car la chaleur due au rayonnement solaire est bloquée par l’isêtre généralisée au bardage isolant. »