L’ouvrage, entièrement métallique, combine surisolation et étanchéité à l’air pour des performances acoustiques optimales. Avions Rafale et sirènes de pompier sont inaudibles de l’intérieur.

 

Pour concevoir le nouveau centre culturel « Les Fuseaux » de Saint-Dizier (52), l’agence d’architecture Nicolas Michelin & Associés s’est inspirée de l’organisation paysagère et urbaine de l’entrée de ville. « L’environnement immédiat du bâtiment est composé de rangées de végétaux, d’alignements d’aménagements urbains, de routes…, décrit l’architecte Gaëtan Jaworski. Nous avons choisi de conserver cet effet de strates pour intégrer l’ouvrage dans ce mouvement. » Résultat, cinq fuseaux de hauteurs et de longueurs différentes accueillent une salle de concert, une salle polyvalente de répétition et un lieu réservé aux musiques actuelles avec studio d’enregistrement.

 
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À l’intérieur de l’ouvrage, grâce aux complexes mis en œuvre en façade mais également en toiture, les nuisances sonores extérieures sont inaudibles.
 

En toiture, ces fuseaux forment des courbes, croissantes puis décroissantes. Ils sont réalisés à partir de panneaux souples en aluminium à joints debout. Ils se rejoignent au niveau de la façade principale en cassettes composites aluminium qui suit elle-même une courbe inversée. Les façades latérales en lames d’acier prélaqué posées en clin voient leur couleur champagne, en référence à la région, changer de ton selon l’ensoleillement. Elles s’ouvrent ponctuellement en ouïes de poisson pour laisser entrer une lumière tamisée à l’intérieur. « Cette déclinaison autour du métal renvoie à l’histoire industrielle de la ville, très liée à la métallurgie », explique Gaëtan Jaworski.

 

Avions de chasse

 

Si l’environnement rectiligne de l’ouvrage a inspiré l’écriture architecturale du centre culturel, sa proximité avec la base 113 de l’armée de l’air française, équipée d’une cinquantaine d’avions Rafale, a largement dicté la définition des différents complexes composant l’enveloppe. Avec en première ligne, l’enjeu acoustique. « Il s’agissait moins de réduire la transmission de bruits de l’intérieur vers l’extérieur comme il est fréquent dans les salles de spectacle, que d’empêcher les nuisances sonores extérieures de perturber les événements qui se produisent à l’intérieur », poursuit l’architecte. L’ouvrage devait donc présenter une isolation phonique et une étanchéité à l’air irréprochable. 

 
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Le bâtiment a été conçu comme une succession de strates.
 

Étanchéité à l’air

 

C’est pourquoi chaque façade, de même que la toiture (voir encadré), comprend deux épaisseurs d’isolant et un pare-pluie. Dans le détail, sur la façade principale, « les plateaux porteurs en acier sont perforés et remplis de 75 mm d’épaisseur de laine de verre. Vient ensuite la deuxième couche d’isolant (100 mm d’épaisseur) puis la pose d’une ossature verticale réglable, d’une membrane d’étanchéité assurant l’étanchéité à l’air et d’un pare-pluie rigide. Des panneaux composites aluminium sont liaisonnés au support par des rails », décrit Ismaïl Polat, conducteur de travaux chez Soprema Entreprises. Sur les façades en retour, un plateau plein supporte 60 mm de laine de roche « pour y amener de la masse », une seconde couche d’isolant en laine de verre 
(80 mm d’épaisseur), la même membrane d’étanchéité à l’air et le parement en lames d’acier fixé sur une ossature intermédiaire verticale.

 
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La façade de l’entrée principale forme une vague en parements composites aluminium.
 

Ces complexes sont très épais (320 mm et 330 mm). En outre, la membrane d’étanchéité à l’air en façade est intégralement raccordée avec celles mises en œuvre en toiture (voir encadré). L’indice d’affaiblissement acoustique est supérieur à 33 dB pour le premier et 45 dB pour le second. Résultat, « le passage des avions de chasse deux fois par semaine est inaudible de l’intérieur », se réjouit l’architecte.

 

Du bardage entre chaque fuseau

 

« Chaque lame en acier prélaqué a été découpée aux mesures directement sur la chantier », rappelle le conducteur de travaux. Une opération qui s’est avérée fastidieuse lors des interventions en hauteur, sur les faces latérales des fuseaux situés au milieu du bâtiment. « Pour des raisons de sécurité, aucune lame n’a été coupée en hauteur. Pour chac

 

une d’elle, il a fallu monter pour prendre la cote, descendre pour tailler le métal et remonter pour poser l’élément. »

 
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L’angle spécifique donné à l’inclinaison de chaque ventelle permet de créer une lumière tamisée à l’intérieur du bâtiment.
 

Cette technicité se retrouve également dans le respect des exigences de l’architecte quant à la forme et au calepinage de l’enveloppe. « Pour réaliser la façade courbe, nous avons recréé une mini-charpente métallique horizontale en tête de bardage, fixée tous les 2,5 m sur des consoles elles-mêmes liaisonnées à la structure principale, précise le conducteur de travaux. Ce système supporte l’ossature verticale destinée aux parements composites en aluminium. » Les joints creux de ces panneaux devaient être parfaitement alignés avec les joints debout de la couverture. « En théorie, les trames des deux produits font 500 mm de large. En pratique, l’aluminium de la surcouverture étant cintré naturellement, l’entraxe mesure 502 mm, poursuit Ismaïl Polat. Nous avons décalé très légèrement les parements de couverture sur chaque fuseau pour rattraper le décalage avec la façade, de manière à ce que cela soit invisible à l’œil nu. »

 

Esthétique complexe

 

Les 1 600 m² de façades latérales en lames en acier sont, quant à eux, complétés par des ventelles métalliques de même teinte. Leur mode de fixation a permis de créer l’inclinaison souhaitée par l’architecte. Le principe : des pattes intermédiaires sont liaisonnées aux profils de bardage en partie haute et basse par une ossature verticale en aluminium laqué. « C’est par le réglage des pattes que nous avons donné l’angle souhaité aux brise-soleil », souligne le conducteur de travaux.

 
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Le complexe mis en œuvre en toiture est finalisé par des panneaux souples en aluminium à joints debout.
 

Un an de travaux a été nécessaire à l’agence rémoise de Soprema Entreprises pour réaliser l’ensemble de l’enveloppe. Dix personnes en moyenne sont intervenues simultanément sur ce chantier.

 

Un système complexe aussi en toiture

 

Les 3 000 m2 de toiture devaient également répondre aux contraintes acoustiques, d’étanchéité à l’eau et à l’air, tout en représentant un élément clé de l’identité architecturale de l’ensemble.

 

Ils sont divisés en cinq fuseaux qui partent du sol pour se terminer à la crête de la vague formée par la façade principale. Tout comme le reste de l’enveloppe, le système mis en œuvre sur bac acier est complexe. Deux membranes bitumineuses autocollantes spécifiquement dédiées à l’isolation phonique sont collées en fond de plateau. Entre deux épaisseurs d’isolant (70 mm et 80 mm de laine de verre, interposée dans l’épaisseur de la panne Z sur échantignole), une troisième feuille bitumineuse est collée sur les lèvres du plateau. Un second bac acier supporte une épaisseur de 120 mm de laine de verre compressée à 100, une ossature métallique, des pattes de fixation et des éléments de parement en aluminium à joints debout. « Ces derniers sont arrivés en bobine sur le chantier. Ils ont été pliés en U et cintrés directement sur site au fur et à mesure de la mise en œuvre sur des pentes pouvant atteindre 70 % » explique le conducteur de travaux Ismaïl Polat. Une épaisseur totale de 322 mm pour un indice d’affaiblissement acoustique Rw + Ctr > 45 dB.