Bardage.Info Que se passe-t-il si les résultats exigés par la réglementation en matière de performance thermique d’un bâtiment ne sont pas atteints ?
Fabienne Tiercelin En construction neuve, un entrepreneur doit respecter les exigences de la RT 2012 pour une très large majorité des bâtiments, tandis qu’en rénovation, la RT existant datant de 2007 reste applicable. Si, à la suite des travaux, les résultats de performance énergétique escomptés ne sont pas atteints, les travaux devront être repris. On distingue alors deux cas de figure : avant et après réception de l’ouvrage.
B.I. Qu’en est-il dans le premier cas ?
F.T. Pour mieux illustrer notre propos prenons deux exemples d’obligations liées à la RT 2012 pour vos métiers : l’obligation de mesure de la perméabilité à l’air qui implique un objectif maximal de parois déperditives (variable selon le type de bâtiment) et un niveau des déperditions maximales induites par les ponts thermiques linéiques. À l’achèvement des travaux, le diagnostiqueur devra établir pour le compte du maître d’ouvrage une attestation de respect de la RT 2012 en se basant sur un certain nombre de mesures dont celles citées. Il devra faire appel à des professionnels compétents pour les tests d’étanchéité à l’air par exemple. À l’aide de porte soufflante, de poire à fumée, de thermographie, le mesureur professionnel certifié procédera aux différentes mesures nécessaires.
Si les résultats de son test, au regard de la RT 2012, ne sont pas conformes aux performances exigées, l’entreprise concernée doit impérativement reprendre ses propres travaux, avant réception, pour être conforme à l’engagement de respect de la RT 2012.
B.I. Qu’en est-il en cas de rénovation ?
F.T. En ce qui concerne la réhabilitation de l’existant, une entreprise peut prendre, par exemple, le leadership sur un chantier de rénovation d’une maison.
Elle effectue une proposition globale et s’occupe de trouver les différents corps d’état qui réaliseront les travaux d’isolation sur la toiture, les façades, les baies, … Elle peut être amenée à garantir à son client un changement d’étiquette énergétique, par rapport à un diagnostic de performance énergétique effectué au départ du projet (exemple : un passage de D à B). Cette entreprise prend ici un engagement contractuel par rapport à son client. Si cet engagement n’est pas atteint au moment de la réception, l’entreprise reste responsable de ses propres travaux et des solutions à trouver pour y remédier sur ses fonds propres.
En période de crise économique, il est essentiel aussi bien pour l’entreprise que pour son client, de sécuriser l’investissement du maître d’ouvrage, par le biais d’une garantie sur le résultat en termes de thermique des travaux réalisés, à laquelle l’entreprise pourrait souscrire.
Si la performance énergétique n’est pas atteinte, l’assureur apporte avec cette garantie « Erreur Thermique », une somme qui va permettre de réaliser des travaux complémentaires pour corriger le problème ou apporter un dédommagement au maître d’ouvrage, si techniquement il devient impossible d’aller plus loin dans la performance.
B.I. Et si des travaux de rénovation plus importants sont entrepris sur un immeuble collectif d’habitation ?
F.T. Dans ce cas, nous conseillons au maître d’ouvrage engageant une lourde rénovation thermique avec isolation des façades par l’extérieur par exemple de souscrire une « Dommages ouvrage » à laquelle on peut associer une garantie « Erreur Thermique ». L’assurance dommages ouvrage va sécuriser son investissement et permettra le préfinancement des travaux en cas de désordres. Si en outre, la performance énergétique n’est pas atteinte à la réception, la garantie « Erreur Thermique » pourra jouer dans les mêmes conditions que précédemment explicitée.
B.I. Qui est responsable après réception ?
F.T. Là encore, plusieurs cas de figure peuvent se présenter. Il peut s’agir d’une impropriété à destination et éventuellement entrer dans le cadre de la garantie décennale. Prenons l’exemple d’un immeuble d’habitations totalement rénové avec une isolation thermique par l’extérieur associée à un bardage rapporté. Si la mise en œuvre du bardage est source de dommages, tels que des infiltrations généralisées dans les logements, la responsabilité décennale de l’entrepreneur est engagée. En d’autres termes, si la façade n’est pas conforme et provoque un inconfort flagrant, nous pouvons avoir alors une condamnation au titre de l’impropriété à destination. D’où l’importance de la qualité de la formation des intervenants et de la qualité des produits utilisés.
Dans le cas d’un engagement contractuel (c’est-à-dire allant au-delà de la réglementation thermique applicable), les choses sont encore différentes. En effet, nous nous retrouvons sur un engagement performantiel, qui est généralement exclu des contrats d’assurance. Dans cette situation, l’entreprise restera seule à supporter la reprise des désordres au regard de l’engagement contractuel qu’elle aura pris envers son maître d’ouvrage.
B.I. Que devient la performance énergétique dans le temps ?
F.T. La loi sur la Transition Energétique votée le 17 août 2015 tient compte de cet aspect. L’article 31 définit l’impropriété à la destination du fait d’une surconsommation énergétique qui résulterait de dommages liés à un défaut de produits, à la conception ou à la mise en œuvre de l’ouvrage, de l’un de ses éléments constitutifs ou de l’un de ses éléments d’équipement. Mais nous n’avons pas encore de recul pour expliciter la loi.
Imaginons le cas d’un maître d’ouvrage qui réalise des travaux importants de rénovation et
s’aperçoit, après un certain délai, que la performance énergétique n’est pas atteinte (surconsommation d’énergie par exemple).
Si cela vient d’une erreur de conception, d’un problème de matériaux ou de mise en œuvre : il s’agit d’une erreur liée aux travaux du bâtiment. L’entreprise n’a donc pas effectué sa mission en tant que professionnel, conformément aux règles de l’art et la responsabilité décennale entre en jeu.
En revanche, la garantie décennale ne prendra pas corps pour tout ce qui est « non performance », « non atteinte d’un résultat », cette fois liée à l’utilisation erronée par le maître d’ouvrage, lorsqu’il occupe les locaux (après investigation de contrôle). Il s’agit alors d’un usage inapproprié. Mais cela sous-entend que le professionnel a fourni une information détaillée sur l’utilisation et l’entretien du bâtiment, au maître d’ouvrage ou au client usager. Cette étape est indispensable. Il faut vraiment insister sur ce point. Elle va devenir essentielle dans la chaîne de déclenchement des responsabilités, car les équipements deviennent plus techniques et plus sophistiqués.